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Fukushima : une catastrophe «d’origine humaine»


Les bâtiments réacteurs endommagés de la centrale nucléaire de Fukushima-Daiichi, photographiés en février 2012. (Yoshikazu Tsuno/AP/SIPA)

L'accident de la centrale nucléaire de Fukushima, au Japon, est le résultat d'erreurs humaines graves, d'un manque de régulation et d'anticipation, conclut une enquête indépendante.

Le rapport de la commission d’enquête japonaise indépendante sur l’accident de la centrale nucléaire de Fukushima-Daiichi est accablant. Accablant pour tous les acteurs de la filière nucléaire japonaise et au-delà pour les responsables politiques du pays. Certes, l’accident du été déclenché par le séisme et le tsunami du 11 mars 2011. Mais ce désastre aurait pu être anticipé et évité, estime le président de la commission, le Dr Kiyoshi Kurokawa.
Voir l'infographie: Fukushima, une catastrophe sans finEt retrouvez tous nos articles dans la rubrique spéciale Fukushima

L’accident est le résultat « d’une collusion entre le gouvernement, les régulateurs et TEPCO, et leur manque de gouvernance. Ils ont trahi le droit de la nation de se protéger des accidents nucléaires. Par conséquent, nous concluons que l’accident est clairement "fabriqué par l’homme"» (‘manmade’ dans le résumé anglais du rapport).

Pas d'anticipation des risques par TEPCO

Les enquêteurs prennent pour exemple le risque d’une coupure générale de courant dans la centrale de Fukushima-Daiichi en cas de tsunami et de montée du niveau de la mer jusqu’au site. Ce risque était connu depuis 2006 par les régulateurs –donc la NISA, l’agence nucléaire japonaise- et TEPCO, l’exploitant de la centrale. Ils savaient aussi qu’il y avait un risque de dommages sévères sur les réacteurs en cas de perte des pompes qui amènent l’eau pour refroidir les réacteurs, soulignent le rapport. « La NISA savait que TEPCO n’avait préparé aucune mesure pour réduire ou éliminer le risque, mais elle n’a donné aucune instructions spécifiques pour remédier à cette situation » peut-on lire dans les conclusions du rapport.

De fait, la perte de courant et la perte du système de refroidissement ont provoqué un enchaînement fatal après le séisme.

Un désastre "Made in Japan"

Très rapidement après le début de la catastrophe nucléaire des voix isolées se sont élevées au Japon, notamment chez des universitaires, pour dénoncer l’action inappropriée de TEPCO et des autorités, avant et après l’accident. Un rapport publié l'an dernier mettait déjà en cause TEPCO et le gouvernement. L'Agence internationale de l'énergie atomique (AEIA) avait pointé le fait que la centrale était mal préparée au risque de tsunami.
La population japonaise, méfiante, a cherché d’autres sources que celles des autorités. Ce rapport confirme la crise de société provoquée par l’accident de Fukushima et la remise en cause profonde qu’elle suscite.
« Ce que nous devons admettre, même si c’est douloureux, c’est qu’il sagit d’un désastre ‘made in Japan’, écrit Kiyoshi Kurokawa. Ses causes fondamentales se trouvent dans les conventions profondément ancrées de la culture japonaise : notre réflexe d’obéissance ; notre réticence à remettre l’autorité en question ; notre dévotion à ‘coller au programme’ ; notre suivisme ; notre insularité ».
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