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8.9.13

Dessin - Syrie : y aller, mais de loin !

Présentée il y a quelques jours comme imminente, l'intervention internationale en Syrie n'a plus l'air si urgente. Le 29 août, le Parlement britannique a rejeté le principe d'un engagement au côté des Etats-Unis en l'absence d'une résolution de l'ONU – qui n'arrivera jamais, eu égard au soutien que la Russie et la Chine apportent au régime de Damas.Barack Obama, qui avait affirmé que le recours à des armes chimiques constituerait une ligne rouge à ne pas franchir sous peine de représailles, semble donc tout à la fois bien seul et bien embarrassé. Vu l'hostilité affichée par ses concitoyens à toute idée d'intervention, on peut présumer que s'il lance son pays dans la bataille, ce sera de loin, et pas massivement.


Présentée il y a quelques jours comme imminente, l'intervention internationale en Syrie n'a plus l'air si urgente. Le 29 août, le Parlement britannique a rejeté le principe d'un engagement au côté des Etats-Unis en l'absence d'une résolution de l'ONU – qui n'arrivera jamais, eu égard au soutien que la Russie et la Chine apportent au régime de Damas.

Barack Obama, qui avait affirmé que le recours à des armes chimiques constituerait une ligne rouge à ne pas franchir sous peine de représailles, semble donc tout à la fois bien seul et bien embarrassé. Vu l'hostilité affichée par ses concitoyens à toute idée d'intervention, on peut présumer que s'il lance son pays dans la bataille, ce sera de loin, et pas massivement.
Dessin de Kal paru dans The Economist

7.9.13

L'injure faite à Georges Braque

Il est avec Picasso, l'inventeur du cubisme, mais c'est à l'artiste espagnol que la postérité a attribué la paternité du mouvement. Récit de l'une des grandes injustices de l'histoire de l'art. En présentant Braque à Picasso fin 1907, Apollinaire ne se doutait pas du dialogue créatif qui allait naître entre les deux peintres. Au moment de leur rencontre, Picasso et Braque occupaient des places très différentes dans le paysage artistique parisien. Picasso était déjà considéré comme une personnalité forte et indépendante. Des collectionneurs avaient acquis des toiles de ses périodes bleue et rose et l'intérêt qu'Ambroise Vollard, le marchand le plus clairvoyant du temps, portait à son œuvre, ne faisait qu'ajouter à son prestige. La carrière de Braque avait été moins précoce, et plus lente. Jusqu'à ses magnifiques toiles fauves exposées au Salon des indépendants de 1907 (La Baie de La Ciotat), il n'avait rien fait de particulièrement remarquable.
C'est en 1908 que Picasso et Braque commencèrent à se voir quotidiennement, à visiter ensemble musées et expositions, à avoir de longues discussions et à se montrer leurs œuvres. Ils furent surpris de constater que leurs recherches allaient dans la même direction (Braque, Maisons à l'Estaque ; Picasso, La-Rue-des-Bois).
Mais de quelles recherches s'agissait-il? On comprend l'ahurissement des contemporains devant ces toiles «cubistes» où Braque et Picasso semblent voir le monde à travers un miroir brisé. Les cubes eux-mêmes tendent à disparaître pour faire place à des angles aigus, à des plans stridents et brefs, à des triangles imbriqués les uns dans les autres (Braque, Joueur de mandoline). Les objets n'ont plus de contour et paraissent s'être cassés. La vision cubiste n'est plus celle de l'apparence, mais celle de l'esprit et de l'intelligence. Entre les deux artistes, les variations sont infimes: primauté de la figure humaine chez Picasso, qui cristallise la zone des visages ; obsession de la nature morte chez Braque, désireux de maintenir un contact avec la réalité. Ces grands duos permettent d'entrer dans le jeu d'échanges au jour le jour, de déceler la spécificité des démarches au sein de recherches communes, d'approcher deux tempéraments de natures contraires, qui sont allés prendre chacun chez l'autre ce dont il avait besoin pour avancer: Picasso, une aptitude à sérier les problèmes picturaux et de la rigueur ; Braque, de l'énergie et de l'imagination.
A la déclaration de guerre, Braque dut rejoindre son régiment à Paris. Picasso l'accompagna à la gare d'Avignon. C'est là que prit fin leur dialogue de plusieurs années. Tout de suite, la plupart des écrivains et des critiques firent de Picasso le fondateur du cubisme. Pire: quand Braque était mentionné, on le citait comme simple disciple. Il aurait pourtant suffi de mettre en parallèle des toiles des deux artistes pour reconnaître leur parfaite connivence, mais les raisons de la primauté de Picasso aux yeux du public étaient évidentes: sa personnalité était plus flamboyante que celle de Braque. Tous voyaient en lui le chef de file de la peinture d'avant-garde. Ce n'est qu'après la guerre que l'on commença à comprendre le véritable rôle de Braque dans l'invention du cubisme. Daniel Henry Kahnweiler, qui fut leur marchand à tous deux, écrivit en 1920: «Dans l'élaboration du nouveau style, leurs apports à l'un et à l'autre furent étroitement entremêlés. Leur quête mentale mutuelle et parallèle a scellé l'union de deux tempéraments tout à fait différents.»
Désormais séparés, les deux artistes continuèrent à s'informer l'un de l'autre, mais quelle différence entre Picasso, statufié de son vivant, qui transforme en or tout ce qu'il touche et Braque dont la vie, sans hardiesse, n'éclaire nullement sa peinture! Alors que Picasso a droit tous les ans à un cortège d'expositions des deux côtés de l'Atlantique, où la seule mention de son nom assure une cohorte de visiteurs, la rétrospective que le Grand Palais consacre à Braque cet automne est la première depuis près de quarante ans. Par bonheur, tout y est, ou presque, tout ce qu'on pouvait espérer, les chefs-d'œuvre et les œuvres clés. On y retrouvera la prédilection de Braque pour les intérieurs et les natures mortes, la lente et profonde réflexion qui n'a cessé de soutenir ses inventions plastiques et la sobre gravité de sa palette qui font de lui l'héritier des grands maîtres du classicisme français, de Nicolas Poussin à Paul Cézanne.
Véronique Prat
 
 
LE FIGARO

Karim Achoui contre Charlie Hebdo 05 septembre 2013

La une du n°1099 de Charlie, par RissOn est prévenus: la centaine d’avocats et de juristes qui composent la toute récente Ligue de défense judiciaire des musulmans (LDJM) s’apprête à porter plainte contre Charlie Hebdo, qui a osé publier en une un dessin illustrant les violences de l’armée égyptienne contre les Frères musulmans. Un dessin «islamophobe» donc, puisqu’il est titré «Le Coran c’est de la merde». Ils se sont mis à cent pour déchiffrer le titre d’un dessin satirique. Que le titre. Deux cents yeux pour ne lire qu’un quart d’un dessin. Belle performance.
La petite troupe est menée par l’avocat Karim Achoui. Un avocat radié du barreau en 2012 et très régulièrement désigné comme «l’avocat du milieu» par une presse bourgeoise qui oublie que même la pègre a le droit d’être défendue. Passons sur le curriculum vitæ d’ex-maître Achoui, on aura l’occasion d’y revenir plus tard.
Karim Achoui a fondé la LDJM pour lutter contre l’islamophobie. Mais il poursuivra Charlie Hebdo pour incitaion à la haine raciale. Son but est le même que celui des associations musulmanes qui avaient attaqué notre journal suite aux publications des caricatures danoises de Mahomet en 2006: assimiler la critique des religions à du racisme et pénaliser le blasphème. Utiliser l’image du Coran pour à la fois se foutre de la gueule des Frères musulmans qui voulaient faire de la religion une arme politique et dénoncer les violences de l’armée égyptienne, c’est donc insulter le milliard et quelques de musulmans en raison de leur «race»... Parce que nous nous étions moqués de la Vierge, l’extrême droite catholique nous a bien attaqués pour «racisme anti-français»! Karim Achoui prend modèle sur ces glorieux défenseurs des droits de l’homme.
Quitte à lutter contre la haine raciale, pourquoi Karim Achoui ne met-il pas ses talents de radié du barreau au service du MRAP, de SOS Racisme, de la Licra ou de toute autre association qui lutte contre les discriminations? Parce que la lutte contre le racisme n’est plus à la mode. Non pas que le racisme a été éradiqué de France, loin de là, mais parce que l’islamophobie est plus porteuse médiatiquement. À tel point qu’on a l’impression que les étrangers ou les citoyens d’origine étrangère ne sont plus agressés en France que parce qu’ils sont musulmans... Les victimes de racisme qui sont d’origine indienne, asiatique, rom, noire africaine, antillaise, etc., auront bientôt intérêt à se trouver une religion si elles veulent être défendues. L’extrême droite musulmane (trop souvent appelée salafiste), qui essaie d’imposer aux autorités judiciaires et politiques la notion d’islamophobie, n’a pas d’autre but que de pousser les victimes de racisme à s’affirmer musulmanes. D’ailleurs, Karim Achoui décrit son action dans Marianne comme étant «un combat communautaire pour des libertés individuelles». Et puis sur iTélé, où il faisait de la retape pour son association, le radié du barreau estimait la population musulmane en France à 8 ou à 10 millions de personnes, soit «la population de la Tunisie». Ce chiffre délirant fait de chaque immigré ou enfant d’immigrés d’origine musulmane un musulman de fait. Un peu comme si chaque enfant de catholiques ou de juifs était obligatoirement un catholique ou un juif. Karim Achoui reprend à son compte le discours de l’extrême droite française, qui aimerait voir en chaque immigré basané un musulman. Les musulmans, il semble lui aussi les identifier au faciès. Si c’est le cas et fort de ce talent, Achoui peut peut-être entamer une carrière de flic.
Pour ceux que les chiffres obsèdent, rappelons qu’en 2010, selon une enquête de l’Ined (Institut national d’études démographiques) et de l’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques), 2,1 millions de personnes se déclaraient musulmanes en France, tandis que 11,5 millions se disaient catholiques et 125 000, juives... Oui, ce sont des chiffres qui font mal aux communautaristes de tout poil.
Nous attendons donc la plainte de la LDJM, une plainte infamante si elle n’était pas surtout ridicule puisqu’elle nous range, nous, qui sommes pour la régularisation des sans-papiers et le vote des immigrés, dans le camp de ceux que nous combattons le plus radicalement: les racistes et les fascistes.
Karim Achoui et tous ceux pour qui l’islamophobie représente le bon filon pour exister médiatiquement ne peuvent pas sortir totalement perdants d’un procès comme ils nous en promettent un. Si la justice leur donne raison, c’est effectivement une victoire pour le communautarisme religieux et l’extrême droite musulmane, catholique, juive et autre, puisqu’un délit de blasphème empêchera tout commentaire critique ou humoristique de textes et de rituels qui ne seront plus sacrés uniquement pour ceux qui y croient et qui les pratiquent, mais également pour ceux qui ne croient pas. Si la justice leur donne tort, ils pourront fédérer autour d’eux l’extrême droite musulmane et les paranoïaques qu’elle manipule, qui crieront d’une seule voix au complot anti-islam. À bientôt, donc, Karim Achoui.

La laïcité, c'est par où?

 


À quoi bon défendre la laïcité? Ça fait belle lurette que la République a gagné le combat contre ces curetons qui rêvaient d’imposer leurs vues au pays! 1905! Depuis 1905, le match est fini! Que peuvent faire quelques fous de Dieu contre l’invincible et éternelle laïcité? Laissons-les revendiquer ce qu’ils veulent, ils se fatigueront tout seuls...
Un bâtiment qu’on n’entretient pas tombe en ruine, un muscle dont on ne se sert plus s’atrophie, une idée dont on ne se rappelle pas le sens sera oubliée.
La laïcité, c’était hier encore le boulevard neutre sur lequel un croyant pouvait croiser un athée sans lui taper dessus. Et inversement. C’est devenu un chemin envahi de ronces sur lequel on ne rencontre plus grand monde, à part les taupes du Front national. Elles minent le terrain.
Comment expliquer que la laïcité, qui nous paraît si vieille, est en réalité une idée nouvelle en France et dans le reste du monde ? En demandant simplement à ses défenseurs : la laïcité, c’est par où ?

 
CHARLIE HEBDO