ANOMALIES. Panique chez les parents à Fukushima. 40% des quelque 100.000 enfants qui ont subi une échographie depuis octobre 2011 présentent des anomalies de la thyroïde (1), cette glande dont la sécrétion hormonale contribue à la croissance et au métabolisme énergétique. Parmi eux, 501 ont des nodules (de taille supérieure à 5 mm) ou des kystes (au-delà de 20 mm) suffisamment inquiétants pour requérir des examens complémentaires : prise de sang, test d’urine et éventuellement cytoponction (prélèvement de cellules dans la thyroïde au moyen d’une fine aiguille). Mais seulement 109 de ces 501 enfants ont effectivement passé cette série de tests qui a permis de détecter un premier cas de cancer de la thyroïde chez une adolescente de 16 ans en septembre dernier.
L’université médicale de Fukushima dirige cette vaste étude épidémiologique auprès des 360.000 enfants de la préfecture âgés de moins de 18 ans au moment de l’accident nucléaire. Ces derniers sont examinés directement soit à l’université soit dans leur ville par des centres agréés par l’université. Tous doivent passer une échographie de la thyroïde tous les deux ans jusqu’à leur vingtième anniversaire, puis tous les cinq ans. En avril 2014, tous les enfants seront censés avoir passé un premier examen.
Les premiers résultats, et notamment ce chiffre de 40% de lésions thyroïdiennes, ont semé la confusion dans la préfecture de Fukushima. Angoissés, les parents se pressent dans les cliniques privées pour faire passer des contre-examens à leur progéniture. L’hôpital privé de la ville-préfecture d’Azuma a ainsi exploré les thyroïdes de 400 enfants depuis août dernier, dont une partie avait déjà subi les tests officiels.
DOUBLE-CONFIRMATION. « 99% du temps, nous aboutissons aux mêmes conclusions que l’université médicale, précise le docteur Ikuo Higuchi qui réalise les échographies. Mais les parents veulent une double confirmation. » Les habitants ont en tête le précédent de Tchernobyl : 8000 cas de cancers de la thyroïde diagnostiqués à ce jour dans les territoires les plus contaminés.
L’iode radioactif émis lors d’une catastrophe nucléaire a tendance à se fixer sur la thyroïde quand elle est inhalée ou ingérée. Elle irradie alors cette glande hormonale située à la base du cou pendant toute la durée de vie des éléments radioactifs (l’iode 131 a une demi-vie de 8 jours). Les enfants et les nourrissons dont la thyroïde est en pleine croissance sont particulièrement sensibles à cette contamination et, donc, plus susceptibles de développer des cancers.
POINT-ZÉRO. Mais que signifie ce chiffre de 40% d’anomalies ? Le nombre de cancers de la thyroïde va-t-il flamber à Fukushima comme à Tchernobyl ? Les chercheurs en endocrinologie ou en radioprotection ont encore du mal à se prononcer. « Il ne faut pas tirer de conclusions hasardeuses de ce premier examen, explique le docteur Abraham Behar, président de l’association des médecins français pour la prévention de la guerre nucléaire. Il sert simplement de ‘point zéro’ qui va permettre de voir comment la situation évolue. »
http://sciencesetavenir.nouvelobs.com/sante/20121211.OBS2117/inquietude-sur-la-thyroide-des-enfants-de-fukushima-1-3.html