VU DE SUISSE ROMANDE
"Une victoire qui gifle l'autre Suisse", explique Le Temps, qui titre en une : "Bruxelles, nous avons un problème...". Il oppose "sérénité romande" et "aveuglement alémanique", regrettant "la dynamique hystérique sur la surpopulation et le dumping salarial qui s'est développée au fil des semaines". Le quotidien de Genève estime que la Suisse "rembobine le film de l'histoire" en faisant le choix de reprendre le contrôle de ses frontières. "Le choc est d'autant plus sévère pour le gouvernement et l'establishment politique que c'est la première fois, depuis 22 ans, que le peuple refuse des propositions d'ouverture", poursuit le journal.
Le Temps assure qu'il faut "s'interroger sur les leçons et les conséquences de ce vote". La Suisse, dit-il, est "probablement l'un des pays les plus internationalisés au monde". Mais à l'évidence, une partie de la population "ne comprend plus la logique des échanges et semble n'en percevoir que les aspects négatifs". Il regrette un manque d'explications sur les dossiers concernant l'Europe (recherche, énergie, finance...) par le gouvernement fédéral de Didier Burkhalter, un silence "qui se paie cash dans les urnes".
VU DU PORTUGAL
Le Portugal semble directement concerné par le résultat du vote helvétique : ces dernières années, c'est de ce pays qu'est parti le plus important contingent d'immigrés de l'UE à destination de la Suisse. L'éditorial du journal portugais Público résume de façon laconique la problématique du résultat du référendum suisse : "La droite nationaliste a gagné, l'Europe a perdu". L'impact d'une limitation de l'immigration se fera nécessairement sentir au Portugal car, selon le sociologue José Carlos Marques cité par un article du quotidien, "sur les cinq dernières années, la population portugaise résidante en suisse a augmenté de 154 731 habitants, ce qui en fait aujourd'hui la troisième population étrangère du pays (318 000 personnes)", après les Italiens et les Allemands.
Si l'immigration portugaise en suisse ne date pas d'hier (sur ce sujet lire l'article publié par Courrier International), elle s'est accélérée depuis le début de la crise économique en 2008. Les arrivées de migrants portugais se font parfois dans des conditions difficiles. Depuis quelques années, les journaux portugais signalent régulièrement des situations où des concitoyens dorment dans les gares ou les trains suisses, ce qui a poussé l'Eglise portugaise à ouvrir des permanences pour porter secours aux migrants en détresse, mal préparés et dépassés par les prix suisses. Selon le Público, des immigrés portugais installés depuis longtemps en suisse s'organisent désormais pour distribuer de la nourriture dans les stations de trains. Et, selon le Diário de Notícias, ces immigrés "s'inquiètent du résultat du référendum" et réfléchissent à demander la nationalité suisse.
COURRIER INTERNATIONAL